Les lacs de l’écoquartier des Vaites : un pivot pour gérer les eaux pluviales et préserver l’équilibre urbain

Les Vaites : un écoquartier face aux défis de l’eau

L’écoquartier des Vaites, à Besançon, incarne une nouvelle manière d’habiter la ville, où l’eau occupe une place centrale dans la conception urbaine et la vie quotidienne. Quartier pilote en matière d’aménagement durable, il offre une réponse concrète à un enjeu qui ne cesse de prendre de l’ampleur : comment rendre la ville résiliente face à l’augmentation des pluies intenses, tout en maintenant la qualité de vie et la biodiversité ?

Là où, autrefois, les eaux pluviales étaient mises sous terre à coups de tuyaux et de canalisations, l’approche des Vaites est différente : elle fait des lacs artificiels de véritables alliés pour un cycle de l’eau plus naturel, plus robuste et visible, en phase avec le vivant.

Pourquoi gérer les eaux pluviales en milieu urbain ?

  • L’imperméabilisation des sols : bitume, béton, toits — l’eau de pluie ne s’infiltre plus, elle ruisselle, elle se charge en polluants, elle stagne ou inonde.
  • Risques d’inondation accrus avec le changement climatique : des épisodes pluvieux plus intenses, plus fréquents (Météo France, rapport 2022).
  • Pression sur les réseaux d’assainissement : lors des orages, les stations débordent, les eaux usées peuvent se retrouver dans l’environnement.
  • Qualité chimique et biologique de la rivière : chaque rejet impacte la faune, la flore, l’équilibre général du système aquatique.

Ce contexte fait émerger la nécessité de repenser la gestion de l’eau à la parcelle, à l’échelle du quartier.

Les lacs artificiels : outils multifonction pour l’eau et le vivant

Concrètement, comment cela fonctionne ?

Aux Vaites, trois bassins principaux modèlent le quartier (Ville de Besançon) :

  • Bassins de rétention : temporisent les pics de pluie. Plutôt que d’être évacuée en masse, l’eau stagne, puis s’écoule doucement, limitant les risques d’inondation en aval.
  • Bassins d’infiltration : favorisent l’entrée de l’eau dans le sous-sol, reconstituant ainsi la nappe phréatique locale.
  • Plans d’eau paysagers : apportent fraîcheur, abritent biodiversité, servent d’éléments d’agrément pour les riverains.

L’idée : imiter le fonctionnement naturel des zones humides, là où l’eau ralentit, s’auto-épure, nourrit la vie.

Quels volumes sont en jeu ?

Sur l’ensemble du quartier (27 hectares), la gestion intégrée des eaux permet d’absorber jusqu’à 95 % des précipitations annuelles à la parcelle (source : Villes & Espaces).

  • Chaque bassin principal peut contenir jusqu’à 2000 m³ d’eau temporairement — de quoi absorber un orage de 10 mm/h sur tout le secteur.
  • Les infrastructures paysagères, comme les noues, complètent le dispositif, retardant de quelques heures la migration des eaux vers les lacs, favorisant l’infiltration au passage.

Résultat : une réduction de 60 à 80 % des volumes évacués vers le réseau classique, notamment lors des gros épisodes pluvieux (SPL Territoire 25, bilan 2023).

Du bassin technique à la continuité écologique

Ces lacs ne sont plus seulement utilitaires. Ils se transforment en écosystèmes miniatures :

  • Plantes aquatiques filtrantes (iris, joncs, carex) : elles absorbent une partie des métaux lourds et des nutriments, contribuant à une meilleure qualité de l’eau.
  • Faune sauvage : grenouilles, libellules, oiseaux d’eau — espèce après espèce, le vivant reprend ses droits, même en pleine ville.
  • Équilibre thermique : présence d’eau = régulation de la température locale en été, effet de fraîcheur ressenti par les riverains.

De simples infrastructures de stockage, on passe à de véritables supports de trames vertes et bleues urbaines (source : Observatoire des territoires).

Gérer l’eau maintenant, préparer la ville de demain

Quelques chiffres à retenir

  • 20 000 m² de surfaces en eau et zones humides créées dans le quartier.
  • Plus de 50 % de la voirie désimperméabilisée ou construite avec matériaux drainants.
  • 15 à 20 espèces avifaunes observées régulièrement sur les plans d’eau.

Quels bénéfices visibles au quotidien ?

  • Moins de flaques et de ruissellements après la pluie.
  • Absence d’odeurs d’égout et de rejets pollués lors des gros orages.
  • Espaces de promenade réputés agréables, fraîcheur en été.
  • Convivialité sur les rives, observation de la faune par les riverains et les écoles.

Retour d’expérience et enjeux à surveiller

Ce qui fonctionne

  • Entretien facilité : moins de réseaux enterrés, accès simple pour curage ou plantation.
  • Éducation des habitants à la protection de l’eau, sensibilisation sur place (panneaux, visites guidées).
  • Valorisation du quartier et de la faune/flore locale.

Points de vigilance

  • Enjeux de moustiques au printemps/été, nécessitant surveillance et introduction de prédateurs naturels (mésanges, chauves-souris…).
  • Risque de pollution accidentelle ponctuelle (hydrocarbures, déversements), limité par des dispositifs de dégrillage et d’alerte (Mairie de Besançon).
  • Dimensionnement à refaire si pluies extrêmes plus intenses devenaient la norme (évolution climatique à surveiller).

Perspectives : innover pour la résilience urbaine

L’exemple des Vaites inspire déjà d’autres projets, de Besançon à Toulouse et ailleurs. Il prouve qu’on peut :

  • Travailler avec la nature pour gérer l’eau, pas contre elle.
  • Associer technique, esthétique et biodiversité.
  • Impliquer les habitants sur la durée, par l’éducation et l’action locale.

Demain, ces bassins pourront aussi intégrer la récupération d’eau pour l’arrosage, des îlots pédagogiques, voire de la pêche en circuit contrôlé pour renforcer le lien ville-nature. Le modèle ? Un quartier où la pluie n’est plus un ennemi à évacuer, mais une ressource à valoriser.

Sources : - Ville de Besançon – Présentation officielle de l’écoquartier des Vaites - Villes & Espaces – “Au fil de l’eau dans les Vaites” - SPL Territoire 25 – Bilan annuel de gestion écologique de l’écoquartier - Météo France – Chiffres sur l’évolution des précipitations - Observatoire des territoires – Rapport sur la gestion de l’eau urbaine

Articles

En savoir plus à ce sujet :